Gendarmerie nationale Moisdon-la-Rivière, le 17 décembre 1940. 2e légion Compagnie de la Loire-Infér. Section de Chateaubriant Camp de Moisdon-la-Rivière
Rapport de l'adjudant David, commandant le détachement de gendarmerie, sur la situation de certains nomades
L'examen des situations des individus internés au camp de Moisdon, a fait apparaître certains forains ayant un domicile ou une résidence fixe. Parmi ceux-ci, il y en a qui sont dans une situation aisée. Tel est le cas des forains : 1. DEBARRE François, né le 14 mars 1877 à Vienne (Isère), domicilié 14, rue de l'Eau-Courante à Lorient, ainsi qu'en témoigne un certificat de résidence délivré par le commissariat central de Lorient en date du 12octobre 1940. Cet homme est aisé ; il possède un manège et une loterie foraine valant 70 000 F et l'intéressé m'a montré 80 000 F en billets de banque. Il est père de deux enfants, une fille et un garçon. Lafille est veuve et tient un commerce de mercerie à Lorient ; le fils possède un cinéma sonore et parlant à Saint-Brieuc. Debarre François est honorablement connu dans tout le Morbihan et le Finistère ainsi qu'en font foi les certificats des maires de Locminé, Commana, Font-Scorff, Briec, Lampaul, Loctudy et Bénodet. Cet homme déclare n'avoir jamais été condamné.
2. CHEVALIER Archange, né le 30 octobre 1891 à Villabernier (Maine-et-Loire), résidant à Belz (Morbihan) ainsi qu'en témoigne un certificat de résidence du maire de cette localité en date du 4 juillet 1940. Interné au Camp de Moisdon avec sa femme et ses dix enfants : Louise, 30 ans, Marie 28 ans, Jeanne 20 ans, Madeleine 18 ans, Félix 16 ans, Émilie 14 ans, Albertine 12 ans, Olga 10 ans, Archange 6 ans, Madeleine 1 an. La famille Chevalier possède un tir et un cinéma ambulant et deux autos, possède également 3 000 F en argent liquide et le père déclare n'avoir jamais été condamné.
3. RENAUD Joseph, rémouleur, né le 24 juin 1894 à Chantenay (Loire-Inférieure) et y résidant 15, rue Paul-Bert, depuis douze ans, ainsi qu'en fait foi un certificat de résidence délivré le 22 novembre 1940 par le commissaire de police du 7e arrondissement de Nantes. Cet homme est atteint d'angine tuberculeuse, mais peut cependant travailler. Il déclare avoir été condamné pour vol en 1931. Ancien paveur de rue, ne possède aucune ressource, mais vit au jour le jour de son métier de rémouleur, est interné au Camp depuis le 23 novembre 1940.
4. SIEGLER Paul, né le 6 juin 1895 à Châtellerault (Vienne), demeurant 2 bis, rue Féty à Vannes (Morbihan) ainsi qu'en fait foi un certificat de résidence délivré le 22 novembre 1940 par la mairie de Vannes. Cet homme exerce la profession de marchand de cordes et fréquente les foires et marchés aux alentours de Vannes. Cet individu m'a montré 10 000 F en billets et possède de la marchandise par une valeur de 10 000 F. En plus, il est propriétaire d'une voiture-auto avec remorque en bon état. Interné au Camp depuis le 2 novembre 1940 avec sa femme et six enfants : Victoire 18 ans, Marie 17 ans, Catherine 16 ans, François 14 ans, Émile 12 ans, Ernestine 8 ans. Siegler déclare avoir été condamné plusieurs fois pour chasse et pêche en temps prohibé.
De ces quatre individus, seul Debarre François, 63 ans, peut sans inconvénient être libéré. Cet homme n'est à charge de personne et peut vivre sans travailler. Quant à Chevalier et Siegler, bien qu'ayant des ressources, s'ils étaient libérés, ils seraient obligés de reprendre leur vie errante pour subvenir aux besoins de leur nombreuse famille. La Forge en Moisdon-la-Rivière, 7 janvier 1941.
Date de création : 10/04/2009 @ 23:29
Dernière modification : 14/04/2009 @ 10:35
Catégorie : Instructions & Rapports
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