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Un peu d'Histoire - Renaissance
Le fer de l'Europe dans une Renaissance à problèmes Rêves d'Italie : En 1494 Charles VIII peut lâcher la chevaleresque "furia francese", ses mercenaires et ses canons sur une Italie morcelée à souhait*. La Ligue de Venise refoule les Français affaiblis qui peuvent presque tous revenir du Sud de l'Italie en rapatriant leurs canons de fer et leurs nouveaux canons de bronze*. Malgré les exploits de Bayard, La Palice, ou Gaston de Foix, le vieux rêve féodal d'Italie s'évanouit à nouveau pour Louis XII conduit à l'échec par la Sainte Ligue et les Espagnols revenus à la charge avec les mercenaires suisses changés de camp. 1515 Marignan !... François est arrivé, parvenu duc de Milan...cuirasses contre canons sur la miniature de Chantilly : "les piquiers suisses, en rangs serrés sous leurs bannières déployées, se heurtent aux fantassins et surtout à l'artillerie qui, forte de 300 canons, assura la victoire française et brisa la réputation des mercenaires suisses." (J. Delumeau)*. En 1559, à l'instar des anglais rejetés hors de France, Henri II sera contraint d'abandonner les mirages d'Italie ("fors l'honneur" ?). La Grand Forge : D'où vient tout ce fer ? la mise en service des GRANDES FORGES, usines à fer édifiées sur un bon cours d'eau, impose une vision d'avenir des investissements financiers, des transports, du commerce, des besoins de consommation et de la gestion des ressources forestières, hydrauliques, minières, sociales, techniques... "la nouvelle sidérurgie...tendait à exercer une attraction croissante auprès des détenteurs, écclésiastiques aussi bien que laïques, de la puissance foncière"*. Dans chaque grand fief le seigneur souhaite devenir maître de forge* et se repose le plus souvent sur de riches investisseurs*, inventeurs de sites devenant maîtres d'oeuvre chefs d'entreprises; le site choisi doit rassembler les 4 éléments indispensables : un cours d'eau apte à actionner les marteaux et soufflets, proche de forêts pour le combustible transformant des minerais et fondants peu éloignés. Ces conditions limitent les possibilités d'implantations mais sont assez bien réparties du nord au sud de la France, ainsi qu'en Europe. Par son Ordonnance du 30 mai 1413, début de la généralisation des hauts fourneaux, Charles VI se réserve la dixième partie des métaux produits (or et argent convoités) et précise les privilèges des forgerons : "que les Marchands et Maîtres qui font ouvrir les Mines à leurs propres cousts [...] et font Feu, lieu et résidence sur les dictes Mines et Martinets [...] Fondeurs et Affineurs [...] soient quittes, francs et exempts de toutes tailles, aydes et gabelles, quart du vin, péage et autres"*. A partir de 1440 certaines forêts surexploitées doivent être règlementées* et leurs droits d'usages communaux restreints : en plus de la vaine pâture et de la glandée pour l'élevage, fauche de litières ou ramassage de bois mort, des industries en tirent profit : marine, batellerie, charronnage, constructions diverses, bâtiments, ponts, mobiliers... tanneries ou chauffages de toutes sortes, verreries, poteries, briquetteries, fours à chaux et fonderies d'étain ou bronze (canons de bronze, très lourds mais plus faciles à couler, à usiner, plus sûrs et si beaux !)...*sans oublier les forges de toutes les guerres des Grands d'Europe. Ecoute, Bûcheron, arrête un peu le bras ! Avec la Renaissance* la sidérurgie industrielle est née, les transports, le commerce s'améliorent mais l'agriculture, secteur dominant hors corporations, prend du retard. Dans les régions les plus accessibles les prix du bois et parfois du minerai augmentent, un meilleur rendement des grandes forges s'impose; une gestion rationnelle avec une main d'oeuvre restreinte est possible. Les progrès de la Renaissance entrainent des perturbations sociales, politiques, religieuses, les protestants apparaissent plus fréquemment créateurs de grandes forges* et, se déplaçant, les forgerons liègeois diffusent la méthode wallone : "la circulation des hommes assurait seule, en effet, la diffusion des nouvelles techniques."* La France à cette époque est exportatrice de fer*; mais les transformations se font souvent à l'encontre des appareils d'Etat. "la dévastation des forêts fut redoutée" (G. Duby)*... François Ier en 1543 "avisé de faire réduire lesdites Forges à un nombre certain et suffisant pour fournir de fer nostre Royaume seulement"*, ordonne une réduction des forges à fer* : "il y a en ce royaulme plus de quatre cens soixante forges. Il y en a plus de quatre cens érigées depuis cinquante ans; par chacun an il s'en érige vingt-cinq ou trente. Item les forgerons demeurant en icelles sont les plus riches et opulans de ce royaulme. Item combien qu'ils vivent d'art mécanique, ilz ne payent aucune ayde ou subside pour ce qu'ils se dient avoir semblable privilège* que la noblesse de France et de fait en usent". Seul Henri II parviendra à restreindre ces privilèges en 1555*. Le 20 octobre 1565, le très jeune Charles IX, passant à Châteaubriant, apprend la levée du siège de Malte cernée par les Turcs depuis quatre mois, il confirme alors, par dérogation, la coupe de 600 hectares de bois aux Hospitaliers de l'Ordre de Malte en Bourgogne et Champagne "pour employer la dite somme [60000 écus d'or] a la fortification de l'isle de Malthe et munitions de guerre d'icelle"*(S. Benoit). "Parmi les douze établissements attestés comme pratiquant la sidérurgie indirecte dans le Châtillonais [Côte d'Or] au milieu du XVIème siècle, quatre sont au roi, cinq à l'aristocratie laïque et trois aux religieux."(J.F. Belhoste)*; c'est alors une des régions sidérurgiques les plus actives. Ronsard* déplore, "Sacrilège meutrier", la disparition des hautes fûtaies de Gâtine : ... "Ecoute, Bûcheron, arrête un peu le bras ! [...] Combien de feux, de fers, de morts et de détresses Mérites-tu, méchant, pour tuer des Déesses ? [...] De massacrer ainsi nos pères nourriciers ! [...] Adieu vieille forêt, adieu têtes sacrées, ..." Ronsard s'inquiète du travail d'un maître fondeur : "Du vent en ses soufflets dont leur poitrine est pleine, Avecques un grand bruit fait ronfler ses fourneaux; Ainsin en reniflant les nez de ces taureaux Jettent en mugissant une flamme allumée."... le poète de cour, soldat contrarié, contrarié aussi du modernisme intellectuel des sciences et techniques, "la voix d'airin et la langue de fer" vocifère contre les armes à feu en 1555 :"...De quelle genre de mort était digne cet homme Qui premier inventa le fer qui nous consomme Et qui premièrement le canon pertuisa [...] ? Au temps qu'on bataillait sans fraude main à main,..."! Mais pour "Le Beau Royaume" en 1564 félicite l'artillerie française : "...Les autres nuit et jour fondent artillerie Et grands Cyclopes nus font une batterie [...] Et puis frappent si dru sur le métal qui sonne, Que l'arsenal prochain, et le fleuve en résonne. Et bref, c'est un grand Dieu que le Roi des François." (Charles IX a 14 ans). © Georges Vanderquand (2000) Date de création : 15/02/2009 @ 10:54 Réactions à cet article
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